- 8 février 2018
- Actualités , Jurisprudence , Pénal
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Copie d’un fichier se trouvant sur un serveur informatique – application du délit de vol
Selon l’article 311-1 du Code pénal, « le vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ».
Il n’y a de vol que si l’auteur soustrait une chose appartenant à autrui.
Mais lorsque l’objet du vol est une correspondance conservée sur un système informatisé, le fait de la reproduire s’apparente-il à du vol ?
Afin de s’adapter aux évolutions des techniques de transmission, de reproduction et de conservation des documents, la Cour de cassation a jugé que la soustraction par reproduction d’une lettre peut constituer le délit de vol.
L’arrêt qu’elle vient de prononcer le 28 juin 2017 s’inscrit dans cette lignée.
Les faits qui ont donné lieu à ces décisions sont les suivants :
À l’occasion d’un litige qui opposait les associés d’une société d’Avocats, l’un entre eux, qui disposait d’un libre accès au fichier informatique de la société dont il était un des associés, avait téléchargé plusieurs documents que son associé avait enregistrés, ce qui lui valut une plainte de ce dernier pour soustraction frauduleuse.
Poursuivi devant le Tribunal correctionnel, pour sa défense, il soutint qu’il avait libre accès aux documents qu’il avait téléchargés puisqu’ils avaient été enregistrés sur le disque dur de la société.
La Cour de Cassation ayant déjà jugé que la reproduction d’un document téléchargé à partir du disque dur d’un ordinateur peut constituer le délit de vol, la question qui lui était soumise était de savoir si les documents reproduits avaient conservé un caractère personnel à celui qui les y avait enregistrés, en dépit du fait qu’ils étaient conservés sur le serveur de la société dont il n’était pas le seul utilisateur.
Son arrêt approuve la Cour d’Appel d’avoir retenu que le vol est constitué car « le libre accès à des informations personnelles sur un réseau informatique d’une entreprise n’est pas exclusif de leur appropriation frauduleuse par tout moyen de reproduction »
Cet arrêt, qui a été publié, est important. Car il démontre que le partage d’information par stockage sur le disque dur d’un ordinateur, n’a pas nécessairement pour conséquence de le priver de son caractère personnel.
Cet arrêt est à rapprocher des nombreuses décisions qui ont été prononcées sur l’usage de l’internet par les salariés d’une entreprise ainsi que de l’arrêt de la cour européenne des droits l’homme du 5 septembre 2017 qui a jugé que si les états bénéficient « d’une marge d’appréciation pour évaluer la nécessité d’adopter un cadre juridique afin de régir les conditions dans lesquelles un employeur peut adopter une politique qui encadre les communications non professionnelles électroniques ou autres de ses employés sur un lieu de travail » , ils doivent protéger de manière adéquate le droit au respect de la vie privée.
Ces différents contentieux illustrent en effet la difficulté de distinguer les documents qui sont stockés ou transmis par un système informatique à partir d’un support partagé.