Galerie marchande – Association de commerçants

Il est courant que des baux, qui portent sur des locaux situés dans des galeries marchandes, comportent une clause qui oblige le locataire à adhérer, obligatoirement, à l’association des commerçants de la galerie.

Cette association a vocation à animer la galerie et à apporter certains services. Mais elle peut aussi obliger les commerçants à des obligations contraignantes. La première d’entre elles est celle qui les oblige à en devenir membre.

Cette obligation est-elle licite ?

L’article 11 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme précise que la liberté d’association ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui sont prévues par la loi.

L’article 4 de la loi du 1er juillet 1901, qui régit en France la liberté d’association, permet à tout membre de s’en retirer en tout temps, si l’association n’a pas été constituée pour un temps déterminé.

C’est en regard de ces principes, qu’un commerçant a mis en cause la licéité de la clause du contrat de bail qui l’obligeait à adhérer à une association de commerçants.

Le Tribunal de Grande Instance de Paris avait jugé que cette clause est nulle et d’une nullité absolue. Sa décision, sur ce point, a été confirmée par la Cour d’Appel de Paris, le 14 octobre 2008.

Dans un arrêt du 20 mai 2010, qui sera publié (09-65045), la Cour de Cassation rejette, sur ce point, le pourvoi dont elle était saisie en jugeant que la clause du bail est entachée d’une nullité absolue.

La Cour de Cassation refuse ainsi d’accueillir les moyens invoqués par le bailleur qui, notamment, faisait valoir que, le bail ayant été conclu à durée déterminée, l’article 4 de la loi du 1er juillet 1901 ne pouvait être invoqué dès lors que la liberté de retrait de tout membre d’une association n’est expressément réservée que si l’association a été conclue pour un temps indéterminé.

Elle rejette également le moyen qui reprochait à la Cour d’Appel d’appel de Paris d’avoir méconnu la portée de l’article 11 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme au motif que l’adhésion à l’association résultait d’un engagement volontaire et non d’une obligation.

Il est vrai que ce moyen semblait peu pertinent, car le commerçant n’avait pas réellement la liberté d’adhérer ou pas à l’association. La clause du bail ne comportait aucune alternative.

Cet arrêt ne peut qu’être approuvé, car la liberté d’association c’est tout d’abord la liberté de ne pas adhérer à une association.

Et même si l’on peut comprendre l’intérêt d’une telle association pour des commerçants qui exercent dans une galerie marchande, on ne peut non plus, en contrepartie, ignorer les contraintes qui résultent de cet engagement. Car la liberté d’association est parfois très réduite par rapport aux propriétaires des locaux.

En outre, l’association n’est pas le seul cadre juridique qui permet de réunir les commerçants d’une galerie marchande afin d’organiser leurs rapports respectifs.

L’arrêt de la Cour de Cassation aura certainement une portée importante, car non seulement il remettra en cause certaines habitudes, mais ses conséquences financières ne seront pas négligeables. Car en raison de la nullité de la clause, le commerçant peut demander la restitution des cotisations versées.

L’arrêt de la Cour de Cassation comporte à cet égard deux précisions importantes. En jugeant que la clause est entachée d’une nullité absolue, aucune ratification implicite de la nullité ne pourra être opposée au commerçant.

D’autre part, la Cour de Cassation a partiellement cassé l’arrêt qui lui était déféré en jugeant que l’association ne peut demander au locataire le versement d’une indemnité sur le fondement de la théorie de l’enrichissement sans cause. Sa motivation est pertinente, car si en dépit de la nullité de son adhésion, le locataire reste tenu de payer certaines sommes à l’association, quel qu’en soit le fondement, de fait il continuera à lui être lié.

Sa liberté d’adhérer ou de ne pas adhérer ne serait donc pas préservée.

La liberté a parfois un prix. Il est à supporter par celui qui voulait la limiter.

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