Le consommateur : une notion de plus en plus difficile à cerner

Deux arrêts assez récents de la Cour de Cassation relancent le débat sur la notion de consommateur et de non professionnel.

Dans un arrêt du 21 juin 2011 (10-30-645), la 1ère chambre de la Cour de Cassation a jugé que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie de non professionnel et qu’elles peuvent dès lors bénéficier des dispositions de l’article L.136-1 du Code de la Consommation qui impose à tout professionnel, prestataire de services, d’informer le consommateur par écrit de la possibilité de ne pas reconduire un contrat qui comporte une clause de reconduction tacite.

Cet arrêt a été prononcé au profit d’un syndicat des copropriétaires.

En soi, il pouvait d’emblée susciter un étonnement, car les personnes morales, même lorsqu’elles interviennent en dehors de leur domaine de compétence, ne sont pas assimilées à des consommateurs.

Cet arrêt apparait donc comme un revirement mais peut être limité à la seule application de l’article L.136-1 du Code de la Consommation.

Quand les arrêts sont laconiques la pensée a libre cours…..

Le débat a été relancé par un arrêt de la chambre commerciale du 06 septembre 2011 (10-2150083).

De nouveau, c’est l’article L.136-1 du Code de la Consommation qui était au cœur de la discussion.

Le Tribunal de Commerce de Bobigny, dont le jugement a été déféré à la Cour de Cassation, avait jugé qu’une société commerciale pouvait invoquer cet article dès lors que le contrat renouvelable par tacite reconduction avait été conclu dans un domaine de spécialité qui n’était pas le sien.

La Cour de Cassation casse cette décision en jugeant que l’article L.136-1 du Code de la Consommation s’applique exclusivement aux consommateurs et aux non professionnels et qu’une société commerciale ne peut en bénéficier.

Le rapprochement entre ces deux arrêts est troublant d’incertitudes. Faut-il considérer que dans les personnes morales seules les sociétés commerciales ne pourraient se prévaloir de l’article L.136-1 du Code de la Consommation ? Faut-il déduire du contenu de cet article même qu’il établirait une distinction entre les personnes morales, civiles et commerciales ou entre consommateurs et non professionnels ?

Autant de questions auxquelles on aurait souhaité une réponse précise de la Cour de Cassation, et plus précisément d’une chambre mixte réunissant la chambre civile et la chambre commerciale.

Il est regrettable que dans ce domaine, où le droit apparaissait clair, ces deux arrêts jettent le trouble.

On peut d’autant plus le regretter que l’article L.136-1 du Code de la Consommation ne comporte pas en germe des dispositions qui expliquent ce débat.

Le dernier alinéa de cet article précise en effet qu’il est applicable aux consommateurs et aux non professionnels.

Jusqu’à présent, les personnes morales, qu’elles soient civiles ou commerçantes, n’ont jamais été considérées comme des consommateurs. La notion de non professionnel, dont la physionomie est assez trouble, ne permet pas non plus d’y intégrer une personne morale, même pour les contrats qui ne relèvent pas de leur objet social ou de leurs spécialités.

La « fonction » des arrêts de la Cour de Cassation devrait être de réguler le droit. Mais avec ces deux arrêts on assiste, à regret, à un état de confusion.

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