Preuve et secret des affaires : le secret professionnel auquel l’avocat est tenu ne peut constituer une modalité adéquate au règlement de ce différend

En vertu de l’article 145 du Code de Procédure Civile, il est possible, avant tout procès, de demander la production de documents dont peut dépendre, à terme, l’issue d’un litige.

Cette demande peut s’opposer à un motif légitime.

Le secret des affaires constitue parfois ce motif.

Peut-on concilier l’opposition entre la demande de communication de documents, qui peut paraître justifiée, et le secret des affaires, qui l’est tout autant ?

C’est à cette délicate question qu’un président d’un Tribunal de Commerce, statuant en référé, puis une Cour d’Appel ont tenté d’apporter leur contribution.

Le Juge des référés, dans une décision qui paraissait avoir été prise dans des conditions assez contestables, puisqu’il avait statué hors la présence de celui qui demandait la communication des pièces, avait dressé la liste de celles dont il autoriserait la communication après avoir vérifié qu’elles ne portaient pas atteinte au secret des affaires.

Son ordonnance a été annulée. Mais la Cour d’Appel, pour concilier les droits qui étaient en opposition, a autorisé la communication des documents aux avocats.

Comme les avocats sont tenus au secret professionnel, la Cour d’Appel pensait ainsi avoir trouvé un juste équilibre entre la protection des documents, qui bénéficieraient du secret des affaires, et le droit, pour celui qui souhaiterait s’en prévaloir afin d’assurer la défense de ses droits, d’en avoir connaissance.

Implicitement mais nécessairement, la Cour d’Appel considérait donc que les documents que les avocats pourraient consulter seraient protégés par le secret professionnel auquel les avocats sont tenus.

Mais c’est oublier que le secret professionnel ne couvre que les correspondances échangées entre avocats, ou entre l’avocat et son client, ainsi que sur les notes d’entretien et les pièces du dossier.

Le secret professionnel ne s’étend pas aux documents détenus par l’adversaire du client, puisque par définition, ces pièces tant qu’elles n’ont pas été communiquées, ne sont pas des pièces du dossier.

La  Cour de Cassation dans son arrêt du 25 janvier 2016 a donc cassé l’arrêt de la Cour d’Appel en renvoyant les parties à ce qui aurait dû sans douter constituer l’objet essentiel du débat : les documents, dont la communication a été refusée, peuvent-ils réellement être couverts par le secret des affaires et ce secret constitue-t-il un motif suffisant pour s’opposer à un autre droit qui aurait pu être invoqué : le droit à la
preuve ?

On se référera à cet égard à une autre note publiée sur le sujet, sur ce site.

Related Posts