Renouvellement de bail et loyer binaire

Lorsque le loyer est composé à la fois d’une fraction du chiffre d’affaires du preneur, et d’une somme minimale, souvent dénommée « loyer plancher », comment, lors du renouvellement fixer le nouveau loyer ?

Ce loyer binaire est-il incompatible avec les règles statutaires qui donnent une compétence exclusive au Juge des Loyers Commerciaux, à défaut d’accord entre les parties pour fixer le montant du loyer renouvelé à la valeur locative ou à son montant plafonné,

Dans un arrêt du 19 février 2015, la Cour d’Appel d’Aix en Provence a retenu cette incompatibilité avec les règles statutaires, en jugeant que si la liberté contractuelle permet au locataire et au bailleur de fixer, par avance, les conditions de fixation du loyer du bail renouvelé, cette liberté serait limitée aux droits dont ils ont la libre disposition.

Et la Cour de juger qu’à défaut d’accord, elle est tenue de fixer le loyer par référence aux dispositions de l’article L.145-33 du Code de Commerce sans pouvoir excéder la valeur locative.

Dans son arrêt du 03 novembre 2016 (15-16826), la Cour de Cassation casse cette décision.

Elle rappelle que rien n’interdit au bailleur et au preneur de recourir au Juge des Loyers Commerciaux pour fixer le montant du loyer plancher, suivant les règles de l’article L.145-33 du Code de Commerce.

Mais encore faut-il que le contrat prévoit cette faculté.

Cet arrêt peut être rapproché d’un autre arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation du 12 mai 2016 (15-14107).

Un différend opposait le locataire et le propriétaire sur la fixation d’un loyer binaire lors du renouvellement du bail.

Après avoir précisé que les deux composantes du loyer constituent un tout indivisible, elle a jugé que lorsque les clauses d’un contrat de bail fixent les modalités de fixation du loyer renouvelé, le montant de ce loyer ne dépend que de la convention des parties, et échappe aux dispositions qui régissent les statuts des baux commerciaux.

La Cour de Cassation retient que la Cour d’Appel, dont l’arrêt était soumis à son examen, a pu dès lors en déduire que le Juge des Loyers Commerciaux est incompétent pour fixer le loyer du bail renouvelé.

Ces deux arrêts, en apparence, semblent contradictoires. Mais ils ne sont que l’expression d’un même raisonnement.

Si la clause d’un bail définit les modalités de fixation du loyer du renouvellement, notamment avec un loyer plancher et un loyer proportionnel au chiffre d’affaires, le Juge des Loyers Commerciaux est incompétent pour fixer ce loyer qui a fait l’objet d’une convention.

Mais si une clause du contrat de bail, comme c’était le cas dans les faits qui ont donné lieu à l’arrêt du 03 novembre 2016, prévoit de saisir le Juge des Loyers Commerciaux pour fixer le loyer plancher à la valeur locative, alors, le Juge des Loyers Commerciaux est compétent pour fixer cette valeur locative, conformément aux dispositions de l’article L.145.33 du Code de Commerce.

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