- 9 octobre 2019
- Actualités , Jurisprudence , Voies d'exécution - Saisie
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Saisie d’un compte joint
Les comptes joints sont ceux qui sont ouverts au nom de deux personnes.
Il peut s’agir d’époux, de concubins, de partenaires pacsés.
Si l’un des titulaires est redevable de sommes d’argent, son ou ses créanciers peuvent saisir le solde du compte. Mais que saisissent-ils réellement ?
La question revient à déterminer la part du solde créditeur du compte qui peut être attribuée à celui qui doit une somme d’argent, et celle de son conjoint, concubin ou partenaire.
En équité, il serait juste que seule cette part puisse être saisie, et que celui qui ne doit pas la somme d’argent recouvrée par le créancier, ne subisse pas les effets de la saisie.
Ce départage n’est pas cependant toujours simple, et moins encore pour le créancier qui ne dispose pas d’information pour déterminer la part qui revient à son débiteur.
L’arrêt, que la Cour de Cassation a prononcé le 21 mars 2019, présente donc un intérêt particulier pour les créanciers qui effectuent une saisie mais aussi pour les titulaires du compte.
Des concubins avaient ouvert un compte joint. Le créancier de l’un d’entre eux, pour recouvrer la somme qui lui était due, effectua une saisie sur le solde créditeur de ce compte.
Le concubin, qui n’était pas redevable de cette somme, contesta cette saisie en soutenant que le créancier devait identifier les fonds personnels de son débiteur et que seuls il pouvait appréhender.
La Cour d’Appel écarta cette prétention en jugeant, à l’inverse, que c’est au concubin, non redevable de la somme d’argent, de démontrer que le solde créditeur du compte était constitué de sommes qui lui appartenaient en propre.
La Cour de Cassation a approuvé sa décision. Dans son attendu de principe, elle précise le régime des saisies faites sur un compte joint, en jugeant que l’effet attributif de la saisie s’étend sur le solde créditeur de ce compte, dès lors que l’établissent de crédit est débiteur de la totalité de ce solde à l’égard de chacun des cotitulaires.
Elle ajoute cependant que l’effet attributif de la saisie peut être limité par les règles propres au régime matrimoniaux entre époux.
Ainsi, lorsque les époux sont mariés sous un régime de séparation de biens, le solde créditeur du compte est indivis entre eux et ne devrait pas pouvoir être saisi par les créanciers de l’un d’entre eux.
La Cour de Cassation ajoute que chacun des cotitulaires du compte peut établir que le solde créditeur est constitué de fonds qui proviennent de celui qui n’est pas le débiteur de la dette.
La saisie, si cette démonstration est faite, ne pourra alors pas porter sur cette portion du solde créditeur.
La charge d’établir cette preuve n’incombe pas à la banque qui fait une saisie, mais au cotitulaire du compte.